Un village du Burkina Faso. Un village du Burkina Faso. 

Les armées du Sahel critiquées pour leurs méthodes contre les djihadistes

Les armées du Burkina Faso, du Mali et du Niger sont de plus en plus critiquées pour les exactions commises par plusieurs de leurs membres dans le cadre de la lutte contre les groupes djihadistes au Sahel. L'ONU a déjà tiré la sonnette d'alarme, et l'ONG Amnesty International vient de publier un rapport révélant des cas de disparitions forcées et d'exécutions sommaires.

Entretien réalisé par Hélène Destombes – Cité du Vatican

Les populations du Sahel semblent de plus en plus prises en étau entre les groupes djihadistes qui écument leurs territoires, à cheval sur plusieurs pays, et les armées nationales qui subissent souvent des revers et s'en prennent aux civils soupçonnés d'aider l'ennemi. Depuis plusieurs semaines, les accusations d'exactions se multiplient ainsi contre les armées du Mali, du Niger et du Burkina Faso, trois pays qui concentrent l'essentiel des agissements des mouvances djihadistes.

Le 5 juin dernier, le secrétaire général adjoint de l'ONU pour les opérations de paix, Jean-Pierre Lacroix, a exhorté, lors d'une réunion en visioconférence du Conseil de sécurité consacrée à cette région, «la Force conjointe du G5 Sahel et ses États membres à ne ménager aucun effort» pour respecter les droits de l'Homme. Le Conseil a dit «avoir pris note des mesures annoncées par plusieurs gouvernements du Sahel face à ces allégations de violations des droits humains».

Peuls et touaregs, principales cibles

Ce mercredi 10 juin, Amnesty International a publié un rapport affirmant que «des soldats sèment la terreur et commettent des tueries dans des villages sous couvert d'opérations antiterroristes». Ces manœuvres visent «le Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans qui est basé au Mali mais qui est actif au Burkina Faso et un petit peu au Niger», précise le rédacteur du rapport, Ousmane Diallo, chercheur pour l'Afrique de l'Ouest au bureau régional d'Amnesty à Dakar.

Autre groupe dans la ligne de mire : «l’État islamique dans le Grand Sahara qui est présent dans la zone des trois frontières et qui s'attaque régulièrement non seulement aux positions des forces armées mais aussi aux populations civiles qu'elles suspectent d'appuyer ou bien de ne pas être favorables à son projet politique».

Entre février et avril, 57 villageois ont été tués et 142 sont disparus entre les mains de soldats réguliers selon l'ONG qui a fondé son travail sur des entretiens menés avec 33 témoins et sur des photos. «Il y a des tueries de plus en plus répétitives et qui souvent cibles une catégorie de la population, notamment les Peuls et les Touaregs qui sont suspectés dans bien des cas à tort d'être affiliés ou favorables aux groupes armés», décrit le rapporteur d'Amnesty.

Ces homicides pourraient «être constitutifs de crimes de guerre» selon le rapport qui appelle les gouvernements à «mettre un terme à l'impunité» dont jouissent les forces de sécurité. «Le problème c'est que la réponse militaire va de soi parce qu'il y a un problème contextuel avec la présence de ces groupes armés là» reconnaît Ousmane Diallo.

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11 juin 2020, 13:47