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William Barr, le ministre américain de la justice William Barr, le ministre américain de la justice 

Reprise des exécutions fédérales aux États-Unis

En 1992, nommé procureur général par George W. Bush, William Barr avait prolongé les peines de prison requises contre les récidivistes face à l’augmentation de la criminalité. De retour au ministère de la justice sous Donald Trump, il annonce la reprise des exécutions au niveau fédéral. Elles n’avaient pas eu lieu depuis 16 ans.

Marie Duhamel- Cité du Vatican

Cinq hommes seront exécutés en décembre et janvier prochains dans une prison fédérale de Terre Haute dans l’Indiana, au nord des États-Unis. Ils ont épuisé tous les recours légaux possibles, après avoir été condamnés à mort pour avoir «tué parfois torturé et violé les membres les plus vulnérables de la société: des enfants et des personnes âgées», lit-on dans un communiqué du ministère de la Justice.

«Le ministère applique la loi et nous devons, pour les victimes et leurs familles, appliquer les peines déclarées par notre système judiciaire» justifie William Barr. Ces exécutions auront lieu, semble-t-il, à la demande du procureur général nommé par Donald Trump en décembre 2018 pour succéder à Jeff Sessions.

Nouveau protocole

Le ministère de la Justice précise qu’un nouveau protocole d’injection létale a été adopté. Il a renoncé à un cocktail particulièrement controversé qui alliait trois substances pour ne plus utiliser que du pentobarbital, un barbiturique utilisé en médecine vétérinaire et lors de suicides assistés.

Ces dernières années, la combinaison de trois drogues à base de thiopental de sodium a été utilisée dans la majorité des exécutions aux États-Unis jusqu'à ce qu'une série d'événements, entre 2009 et 2010, la rende de plus en plus rare.

Les laboratoires pharmaceutiques ont commencé à refuser de livrer leurs produits pour ne pas être associés à la peine de mort. Après plusieurs exécutions mal menées, plusieurs recours en justice ont également été introduits. Certains États pratiquant la peine de mort ont temporairement arrêté les exécutions.

D'autres ont remplacé le thiopental par un autre sédatif controversé, le midazolam, qui fait également l'objet d'un examen minutieux et de contestations judiciaires en raison d'exécutions ratées dans l'Ohio, l'Arizona et l'Oklahoma.

Décision politique ?

Bientôt donc de nouvelles exécutions fédérales, après 16 ans de trêve. La peine de mort a été réinstaurée au niveau fédéral en 1988, mais seules trois personnes ont été exécutées depuis, la dernière en 2003. Pourquoi le gouvernement a-t-il pris cette décision ? Bernadette Forhan est la présidente de l’ACAT France

Entretien avec Bernadette Forhan, présidente de l'ACAT France

Le président Donald Trump brigue un nouveau mandat en 2020. Il lui est coutumier de réclamer un usage renforcé de la peine de mort, pour les tueurs de policiers, les islamistes ou pour lutter contre le trafic de drogue. Cette décision viserait-elle à séduire son électorat ?

Selon les sondages, 54% des Américains sont favorables à la peine de mort contre 80% dans les années 90. Les points de vue sont marqués selon les affiliations politiques: 77% des républicains la jugent justifiée en cas de meurtre, contre 35% des démocrates.

«Immorale»

Dans l’opposition, plusieurs candidats à la primaire démocrate ont réagi à cette annonce. La sénatrice Kamala Harris se prononce pour un moratoire. Elle juge la peine capitale «immorale», fonctionnant mal et souligne le nombre d’innocents condamnés à tort. Bernie Sanders a, lui, estimé qu’il y avait «déjà trop de violence dans le monde». Quant à l’ancien vice-président de Barak Obama, Joe Biden se dit désormais en faveur de l’abolition au niveau fédéral.

Un pays, mais 3 juridictions

Actuellement 62 personnes sont dans les couloirs de la mort de prisons fédérales contre plus de 2 600 dans les prisons des 50 états américains. En 2017, la juridiction fédérale était à l’origine de 2,16% des condamnations à mort, rapporte l’ACAT, contre 97,66% pour la juridiction des États.

Il existe également une juridiction militaire. En 2017, elle a prononcé 0,18% des condamnations à mort.

20 États abolitionnistes

La peine de mort est donc légale aux Etats-Unis, mais 21 États ainsi que le district de Columbia dont la capitale est Washington, l’ont déclarée illégale. Quatre États ont par ailleurs prononcé des moratoires.

 «Parmi les 31 États qui n’ont pas formellement aboli la peine de mort en 2017, 17 n’ont prononcé aucune condamnation à mort et 23 n’ont procédé à aucune exécution» souligne un dossier de l’ACAT, signé par Anne Boucher, datant de février 2018.

Il existe de fortes disparités régionales. Selon ce document de l’Action des chrétiens contre la torture et la peine de mort, 24 personnes ont été condamnées à mort en 2017 dans le Missouri pour 22 exécutions, alors qu’en Californie, 746 personnes ont été condamnées à mort la même année mais aucune exécution n’a eu lieu depuis 2006.

L’an dernier, les exécutions se sont concentrées dans le sud des États-Unis principalement. Sur les 25 exécutions menées, 13 l’ont été au Texas.

Les Etats-Unis, l’Inde et le Japon, sont les seules démocraties qui conservent la peine de mort.

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26 juillet 2019, 09:33