Photo d'illustration - L'archevêque Edmond Djitangar dénonce une «crise sociale interminable». Photo d'illustration - L'archevêque Edmond Djitangar dénonce une «crise sociale interminable». 

Le Tchad fait face à une grève générale inédite

La contestation sociale enfle face aux mesures d'austérité imposées par le gouvernement. Les fonctionnaires avaient été les premiers à se mobiliser. Ils ont été depuis rejoints par des travailleurs du secteur privé et les magistrats. Face à cette multiplication des oppositions, le gouvernement de N'Djamena durcit le ton.

Entretien réalisé par Joris Bolomey - Cité du Vatican

Au Tchad le gouvernement durcit le ton face à l'opposition. Ce mercredi 7 février 2018, dix partis politiques ont été suspendus pour deux mois pour «troubles à l'ordre public» et «incitation à la violence». La menace avait était lancée la veille par le ministre de la sécurité publique, Ahmat Mahamat Bachir, justifiant l'interdiction de manifester par le contexte sécuritaire dans la zone sahélienne, où plusieurs groupes terroristes, dont Boko Haram, évoluent.

 

Un mouvement inédit paralysant le pays

Les fonctionnaires avaient été les premiers à descendre dans la rue pour contester la nouvelle loi de finances 2018. Ils dénoncent une baisse drastique de leurs primes et indemnités de salaires à partir de janvier dernier. Rejoints depuis par les magistrats et entreprises du secteur privé, ils ont décrété il y a une semaine une grève générale illimitée. Administrations, écoles et autres établissements du service public sont depuis paralysés. Une grogne sociale inédite dans ce pays dirigé depuis 1990 par le président Idriss Déby Itno. 

«Ne pas brûler les étapes»

L'archevêque de N'Djamena, Mgr Edmond Djitangar, a appelé au dialogue, déplorant que les mesures d'austérité décrétées par le gouvernement touchent les plus faibles. Il a lancé un appel à l’unité des Tchadiens, les invitant à «ne pas brûler les étapes» et à ne pas se comparer aux autres, mais à commencer à agir «maintenant, par là où nous le pouvons. Que ce soit par l’engagement politique, dans les syndicats,  les associations de la société civile». «L’Église est là, au cœur des différentes situations, particulièrement aux côtés de ceux et de celles qui souffrent, notamment dans lutte pour la justice et la paix. Elle encourage ses fidèles dans cette lutte, sur tous les fronts suivant les enseignements de ses pasteurs» a annoncé Mgr Djitangar dans une déclaration dont un extrait a été diffusé par BBC-Afrique.

Une politique d'austérité réclamée par le FMI

Et pendant que la démocratie recule, la situation économique de ce modeste État pétrolier, plombée par une crise de la dette plus de trois ans après la chute des cours du brut, ne s'améliore toujours pas. Et pour faire face à cette situation, c’est dans la voie de l’austérité, préconisée par le Fond Monétaire International, que se sont engagées les autorités tchadiennes. Le FMI pose ses conditions avant tout versement d'une nouvelle tranche d'aide au pays. Fin juin dernier, il avait approuvé un accord triennal de plus de 261 millions d’euros pour le Tchad. Mais après un premier versement de 39,7 millions de dollars, le FMI a bloqué toute seconde tranche d’aide à un accord préalable du Tchad avec Glencore, le géant suisse du négoce de matières premières, comme l'explique Cécile Petitdemange, doctorante à l’université de Genève et spécialiste du Tchad, jointe par téléphone à N'Djamena.

Entretien avec Cécile Petitdemange

 

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08 février 2018, 09:31