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Missile dans le ciel de Jérusalem dans le nuit du 15 juin 2025. Missile dans le ciel de Jérusalem dans le nuit du 15 juin 2025.   (ANSA)

Pour le père Patton, la guerre n'efface pas l'espoir en Terre Sainte

Dans un entretien accordé aux médias du Vatican, le Custode de Terre Sainte relate le cauchemar de la guerre vécue par les habitants de Jérusalem. «En ce moment, dit le père Patton, beaucoup ici, et pas seulement parmi les chrétiens, ont le désir de quitter un pays qui, ces dernières années, semble incapable de garantir la paix et s'est enlisé dans une spirale de guerre».

Entretien réalisé par Roberto Cetera - Cité du Vatican

La Terre Sainte est à nouveau au centre de tensions régionales, avec des conséquences importantes pour les populations locales, y compris les chrétiens. «Il semble que nous soyons tombés dans un nouveau cauchemar» déplore aux médias du Vatican le père Francis Patton, Custode de Terre Sainte. «Avant nous voyions les destructions causées par la guerre dans les territoires environnants, maintenant nous les voyons au cœur de la Terre Sainte».

Jérusalem est à nouveau attaquée. Comment les chrétiens de Terre Sainte vivent-ils cette nouvelle période difficile?

Les chrétiens, comme le reste de la population, ont peur. J'ai déjà vu de mes propres yeux la terreur des enfants pendant la guerre en Syrie, je l'ai entendue à Gaza, maintenant c'est ici aussi: des enfants qui tremblent quand ils entendent les sirènes d'alerte suivies des explosions de missiles. Ce sont des traumatismes qu'ils porteront avec eux pour le reste de leur vie. Ensuite, il y a un silence surréaliste qui règne dans les rues, non seulement en raison de l'absence des pèlerins, mais aussi des fidèles locaux qui, dans de nombreux cas, ne peuvent même pas se rendre à l'église. La militarisation des rues est impressionnante. Et puis, en tant qu'amateur du Livre de l'Apocalypse qui parle de la Jérusalem céleste comme d'une ville aux portes toujours ouvertes, je suis étonné de voir les portes de la ville terrestre fermées et gardées. Je pense qu'en ce moment, beaucoup ici, et pas seulement parmi les chrétiens, ont le désir de quitter un pays qui, ces dernières années, semble incapable de garantir la paix et s'est enlisé dans une spirale de guerre qui ne cesse de s'étendre comme un feu que l'on n'arrive plus à contrôler.

Nous imaginons que pour les frères franciscains, les vingt derniers mois ont été marqués par des tensions et des dangers, en Israël et en Palestine, mais aussi en Syrie et au Liban. L'Église universelle apprécie ce que vous faites pour la protection des sanctuaires et pour les nombreuses œuvres de charité que vous avez soutenues au cours de ces mois. Quel est le climat qui règne parmi les frères?

Ici, ce ne sont pas seulement les vingt derniers mois qui sont caractérisés par des tensions et des dangers. Au cours des vintgs derniers mois, le conflit a également touché cette partie de la Terre Sainte qui était relativement stable mais qui était toujours sur le point d'exploser, pour des raisons que vous avez expliquées à plusieurs reprises dans vos articles. Si je regarde ensuite l'histoire de notre présence, nous n'avons jamais connu de longues périodes de tranquillité. Il y a quelques jours, le 13 juin, c'était la Saint-Antoine, patron de la Custodie (il l'est devenu parce qu'il nous a protégés dans des moments très difficiles, quand on cherchait à annuler notre présence). Cette année aussi, nous avons renouvelé notre vœu et notre mandat, car le premier soutien «ecclésial» nous vient de ce qu'on appelait autrefois «l'Église triomphante», c'est-à-dire des saints, à travers la communion à Dieu dans la prière. Nous sommes donc ici au nom et sur mandat de l'Église. 

Nous avons toujours senti le soutien des Papes au cours de l'histoire, et j'ai personnellement ressenti un fort soutien de la part du Pape François, qui nous a rendu visite au fil des ans, nous a confirmés et nous a écrit des mots d'appréciation et d'encouragement, et je suis sûr que le Pape Léon XIV nous encouragera également à persévérer dans cette mission. Je me réjouis de le rencontrer et de lui raconter ce que nous avons vécu et ce que nous vivons. Ensuite, nous avons toujours senti le soutien de la congrégation, aujourd'hui dicastère pour les Églises orientales: le précédent préfet, le cardinal Leonardo Sandri, nous a rendu visite à plusieurs reprises et a également écrit des mots d'appréciation et d'encouragement, avec le Saint-Père, en particulier à l'occasion des centenaires de l'arrivée des premiers frères (1217-2017), de la venue de saint François en Terre sainte (1219-2019) et de l'établissement des commissaires de Terre Sainte (1421-2021).

Le nouveau préfet n'a pas manqué non plus de faire des gestes de sollicitude en donnant une forte impulsion à la reprise de la «Collecte du Vendredi Saint», en nous envoyant quelqu'un qui puisse voir de près la situation actuelle pour nous conseiller et nous soutenir en ce moment difficile, et il a promis d'être parmi nous en novembre, lorsque se tiendra à Jérusalem le Congrès international des commissaires de Terre Sainte. Au cours de ces vingt mois, nous avons également reçu la visite de nombreux évêques et prêtres, venus spécialement pour nous exprimer leur proximité et leur solidarité en ces moments si difficiles. Les derniers en date ont été l'archevêque de Pérouse, Ivan Maffeis, accompagné d'un groupe de prêtres de son diocèse, et l'archevêque de Sienne, le cardinal Paolo Lojudice, accompagné de toute la Conférence épiscopale de Toscane. Ces derniers ont pu faire l'expérience directe de ce que signifie être en Terre Sainte et prendre soin à la fois des Lieux Saints et des chrétiens locaux.

Le vicaire de la Custodie de Terre Sainte, le père Ibrahim Faltas, a été l'un des promoteurs des couloirs humanitaires qui ont permis à de nombreux enfants de Gaza d'être soignés en Italie. D'autres initiatives de ce type sont-elles prévues?

Le vicaire custodial, le père Ibrahim Faltas, a toujours été impliqué dans toutes les causes humanitaires au cours des vingt dernières années. Les opérations auxquelles vous faites référence sont celles liées au transfert d'enfants blessés et mutilés à Gaza vers les hôpitaux italiens. Dernièrement, il a également participé au transfert du petit Adam, mais la plupart des actions humanitaires restent à juste titre cachées. En fait, même le récent transfert des évêques toscans à Amman, dès que la guerre avec l'Iran a éclaté, a été organisé par le vicaire. Toutefois, si vous me le permettez, son plus grand engagement humanitaire de ces dernières années a été de travailler assidûment à l'amélioration des écoles en Terre Sainte et à l'éducation des nouvelles générations à la paix et à la coexistence.

La basilique du Saint-Sépulcre a été exceptionnellement fermée aux fidèles. Quels sont les couvents dans lesquels les frères sont actuellement le plus en danger?

Actuellement, les couvents les plus menacés sont ceux qui se trouvent dans les zones urbaines, comme les couvents de Jaffa et de Ramla, ceux de Haïfa et d'Acco, mais aussi ceux qui se trouvent ici à Jérusalem. On sait que les bombes "intelligentes" n'existent pas et que ceux qui frappent le font normalement dans le but aussi d'effrayer la population. Les «règles» du droit international de la guerre n'étant plus respectées, nous sommes tous dans le même bateau, quelle que soit notre appartenance ethnique ou religieuse. Cependant, nous nous sommes déjà trouvés dans des situations similaires par le passé, cela fait partie de la vocation missionnaire. Une chose est sûre: nous ne sommes pas des mercenaires qui abandonnent le troupeau pour se sauver, c'est la mission que l'Église nous a confiée et nous y resterons confiants dans l'aide du Ciel.

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17 juin 2025, 11:53