Un chrétien tenant priant le chapelet dans le cimetière de La Baule-Escoublac, en France, le 23 février 2022. Un chrétien tenant priant le chapelet dans le cimetière de La Baule-Escoublac, en France, le 23 février 2022.  Les dossiers de Radio Vatican

France: les chrétiens «responsables d’interpeller les candidats» à la présidentielle

Mgr Jean-Luc Brunin est évêque du Havre et ancien président du Conseil famille et société à la CEF. À l’approche du premier tour de l'élection présidentielle française, qui se tiendra le 10 avril prochain, il livre son regard sur les enjeux de cette campagne. Il invite les chrétiens à interpeller les candidats, et à promouvoir des thèmes qui orientent la société française vers l’espérance.

Entretien réalisé par Claire Riobé – Cité du Vatican

Le 10 avril prochain se tiendra le premier tour de l’élection présidentielle française. La campagne présidentielle, bouleversée par la guerre en Ukraine, a vu son candidat favori, Emmanuel Macron, concentrer une grande partie de l’attention des médias. Parmi les thèmes au cœur du débat, la question de la précarité, de l’identité, de la bioéthique ou encore la crise écologique, sont des enjeux particulièrement chers aux cœurs des catholiques. Enjeux qui ont pourtant été délaissés par la majorité des candidats de la campagne, au profit d'autres revendications telles que le pouvoir d’achat.

L’Eglise de France invite aujourd’hui les chrétiens à ne pas se laisser enfermer dans un sentiment d’amertume ou de découragement, à l’image du Pape François, qui écrivait dans Evangelii Gaudium que les chrétiens ont le devoir d’être «en sortie» et missionnaires. «Faire l’opinion publique, c’est aussi la responsabilité des chrétiens en cette période électorale», considère Mgr Jean-Luc Brunin, évêque du Havre et invité au micro de Radio Vatican.

 

On sent qu’il existe une forme de peur chez une partie de l’électorat catholique. En tant qu’évêque, quel regard portez-vous sur les inquiétudes des chrétiens en France ? 

«C’est vrai que les situations sont difficiles, il y a la guerre en Ukraine, il y a eu la pandémie de Covid, et cela a déstabilisé, a insécurisé.  Le danger serait que les chrétiens participent d’un certain mouvement de repli sur eux-mêmes qui marque beaucoup de nos concitoyens, et adoptent une attitude décliniste. Aujourd’hui, il y a certainement une invitation aux catholiques de dire « reprenons toutes les questions qui engagent l’avenir de notre société et de l’humanité, et ne restons pas crispés sur des choses qui nous semblent disparaitre ou mourir». Il faut pouvoir promouvoir des sujets qui engagent l’avenir et qui l’oriente vers l’espérance.»

Interpeller les candidats, une responsabilité chrétienne

 

Cette crispation que vous mentionnez est-elle quelque chose de nouveau chez les catholiques français, ou bien l’avez-vous déjà observée ces dernières décennies ?

«C’est l’inquiétude face à ce qui parait ébranlé, nos sécurités, nos convictions, et c’est dommage sur les chrétiens s’arc-boutent, veulent défendre des positions pour que rien ne change. Ce n’est pas le sens de la dynamique chrétienne. Dieu vient dans l’avenir, et cet avenir il faut oser le regarder. Dans le cadre de la campagne, ils ont la responsabilité d’interpeller les candidats qui se présentent à leur suffrage, sur comment ils nous permettent d’avancer ensemble vers un avenir harmonieux.»

Questions bioéthiques : «un combat pour la vie»

 

Un des thèmes cher à l’électorat chrétien est les questions bioéthiques. Quel regard posez-vous, en tant qu’évêque, sur ces enjeux dans le cadre de la campagne présidentielle ?

«Il me semble que c’est un sujet important, mais un sujet parmi d’autres. Il serait dommage de se focaliser uniquement sur ces questions-là. Parce que le respect de la dignité humaine ne se partage pas. Il y a le respect de la vie humaine au départ et au terme de l’existence, mais aussi le respect de la vie (…) à travers ceux qui vivent l’exclusion au sein de leur propre société. Respect de la dignité humaine aussi pour des migrants, qui sont obligés de fuir leur pays. Donc c’est un combat pour la vie, et il est multiforme.»

Les jeunes chrétiens doivent «oser prendre la parole»

 

On voit beaucoup de jeunes chrétiens se poser des questions sur les résultats de l’élection présidentielle et chercher leur place dans la société française. Quel conseil leur adresseriez-vous durant cette campagne ?

«Oser prendre la parole. Ils sont souvent déçus des querelles politiques, et adoptent une attitude de retrait, de replis. Mais ils doivent pouvoir exercer leur citoyenneté, parce qu’ils nous font entrevoir des questions qui ne sont pas forcément celles des adultes (…).

Vous avez un rôle dans la constitution de l’opinion publique. On ne peut pas se contenter qu’il y ait des dérives extrêmes dans notre société, que ce soit de droite ou de gauche. Il faut pouvoir, dans le dialogue et la rencontre avec les gens, sensibiliser, éveiller les consciences, et être porteurs de ce que l’Evangile nous ouvre comme perspective d’avenir.»

Entretien avec Mgr Jean-Luc Brunin

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28 mars 2022, 12:56