Manifestation contre la loi martiale, à Quezon aux Philippines, le 21 septembre. Manifestation contre la loi martiale, à Quezon aux Philippines, le 21 septembre.  

Philippines: les évêques invitent à tirer les leçons de la loi martiale

Alors que le 21 septembre marque l'anniversaire de l'instauration de la loi martiale dans l'archipel par l'ancien président Marcos en 1972, l'Eglise philippine met en garde contre un retour à ces années où de nombreuses libertés ont été bafouées.

Olivier Bonnel-Cité du Vatican

Le 21 septembre est une date toujours symbolique aux Philippines. Elle correspond à l'instauration de la loi martiale le 21 septembre 1972 par le président d'alors Fernando Marcos. En vigueur pendant neuf ans, cette loi reste un moment sombre de l'histoire de l'archipel car elle a ouvert la porte à toute sorte d'abus. Selon un groupe de victimes, le CARMMA, plus de 30 000 personnes auraient subi des exactions durant cette période, parmi lesquels de nombreux cas de torture. Cette période a aussi été marquée par un vaste mouvement de corruption et d'accaparement des biens au profit de Fernando Marcos et de ses proches. 

L'actuel président Rodrigo Duterte brandi régulièrement le retour à la loi martiale pour gouverner. Il l'avait déclenché en 2017 sur l'île de Mindanao, au sud de l'archipel, pour contrer une rébellion islamiste, ouvrant la voie à de vastes pouvoirs pour l'armée. En avril dernier, le président philippin avait menacé de rétablir la loi pour mieux faire respecter les mesures contre l'épidémie de coronavirus.

Sur le site de la conférence épiscopale philippine, les évêques invitent à mesurer l'effet qu'aurait un retour à la loi martiale dans le pays. «Nous devons tirer les leçons de la loi martiale et en vivre, et nous ne devons pas permettre qu'elle se reproduise» peut-on lire dans le message signé par l'évêque de Balanga, Mgr Ruperto Santos - nous devons valoriser, défendre et promouvoir notre liberté». 

Ne pas répéter les erreurs du passé

En écho à cette préoccupation, l'évêque auxiliaire de Manille Mgr Broderick Pabillo regrette que de nombreux Philippins n'ont tiré aucune leçon de la loi martiale : «je pense que nous n'avons rien appris. Les gens ne sont pas vigilants et n'ont pas le courage de parler, ils se laissent quand même intimider» note t-il. La leçon de la loi martiale ne doit pas être oubliée «afin que ses horreurs ne se répètent pas» soulignent encore les évêques philippins. Mgr Arturo Bastes, évêque émérite de Sorsogon (Est), aujourd'hui responsable de l'action sociale dans le diocèse de Surigao, rappelle pour sa part qu'il a subit le harcèlement durant les années régies par la loi martiale, et insiste lui aussi sur le manque de mémoire de cette période. «De nombreux Philippins semblent avoir un bref souvenir des horreurs de la loi martiale» a t-il souligné. 

Ce lundi 21 septembre, des centaines de manifestants ont défilé dans plusieurs villes des Philippines pour faire part de leur inquiétude d'un possible tour de vis autoritaire de la part du pouvoir. Beaucoup brandissaient des pancartes à l'effigie de Fernando Marcos ou de l'actuel président, s'inquiétant d'un «régime de terreur». 

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21 septembre 2020, 12:41