Des Chiliens font la queue pour obtenir 10% de leurs fonds de pension, le 30 juillet 2020 à Santiago. Des Chiliens font la queue pour obtenir 10% de leurs fonds de pension, le 30 juillet 2020 à Santiago. 

Chili : l’archevêque de Concepciòn invite à «préparer le futur»

Mgr Fernando Chomali a diffusé un message sur les défis de la société chilienne, marquée par de violentes émeutes qui ont été le symptôme d’une crise économique et sociale, aggravée par la pandémie de Covid-19.

Le Chili vit la période la plus difficile de son histoire depuis le rétablissement de la démocratie en 1990. Aux violentes émeutes contre le pouvoir politique, qui se poursuivent de façon larvée, s'ajoutent les conséquences économiquement désastreuses du coronavirus et du confinement, avec plus d'un million de nouveaux chômeurs, et les actions de guérilla de groupes radicaux de l'ethnie Mapuche qui déstabilisent la région de l'Araucanie.

Après avoir essuyé un échec au Parlement, qui a voté une loi inspirée par la gauche autorisant les épargnants chiliens à récupérer 10% de leur fonds de pension afin de faire face à l'urgence économique, le président Sebastian Piñera a remanié son gouvernement en y intégrant des ministres issus de la droite dure, nostalgiques de Pinochet et hostile à la réforme constitutionnelle pourtant promise par le président lui-même afin de calmer la contestation. Plutôt qu'un véritable changement de ligne politique, ce remaniement est toutefois intérprété par certains observateurs comme une tentative du chef de l'État de neutraliser une dissidence potentielle ou une contestation sur sa droite.

La reconstruction du tissu social passe par l'écologie

Malgré ce contexte de grande confusion, Mgr Fernando Chomali invite à préparer le futur avec le défi de «regarder notre vie personnelle, communautaire, sanitaire, politique, sociale et économique avec d’autres yeux, avec d’autres oreilles, avec une autre logique et une autre intelligence» que les critères purement utilitaristes qui structurent habituellement les décisions politiques et les débats de société.

Dans la lignée du Pape François et de son encyclique Laudato Si’, l’archevêque de Concepciòn invite à répondre à la fois au «cri des pauvres» et au «cri de la terre», en mettant en place une «économie écologique» et en développant «de nouveaux styles de vie plus austères». L’écologie, qui est une notion à la fois pratique et spirituelle, doit aussi permettre d’aborder un rapport à la nature plus cohérent avec celui des peuples premiers.

Le peuple a été trompé par les décideurs

Il explique que la colère du peuple chilien contre ses élites politiques trouve ses racines dans plusieurs phénomènes: «le financement illégal de la politique», «l’évasion fiscale» ou encore «le vol d’argent public» ont amené le peuple chilien à perdre sa confiance et à se sentir «floué et trompé». Cet «environnement cleptocratique» doit donc être traité «à la racine»

Un véritable changement implique «un rejet sérieux des pratiques illégales, une rénovation de la classe dirigeante et une prise au sérieux des corps intermédiaires». Face aux problèmes politiques qui se posent, il faut mettre un terme «aux stratégies de communication et de marketing», refuser l’usage de la violence et s’engager à rendre la justice y compris au bénéfice de ceux qui en ont été privés jusqu’à présent.

Renouer avec les racines spirituelles du Chili

Plutôt que de capitaux financiers, cette transformation doit s’appuyer sur «le puits d’espérance, de foi et d’amour du prochain qui est présent dans la vie de millions de personnes simples». Dans le contexte de la pandémie de coronavirus, face à l’incapacité de l’État et de la «main invisible» du marché d’atteindre les secteurs les plus pauvres de la société, la société s’est organisée «avec force et splendeur» pour porter secours aux plus faibles, à travers les relations de quartier, les associations sportives, les paroisses, les familles…

«Le Chili, même si certains veulent le nier, est un pays chrétien», rappelle Mgr Chomali. Avec une foi qui fait de l’amour du prochain le principal critère de mise en mouvement de la relation humaine, avec la confiance en Dieu qui donne espérance dans le futur, et non pas dans une logique de conquête d’autorité et de pouvoir, ce pays pourra retrouver sa «force morale». «C’est ainsi que nous pourrons “préparer le futur” plutôt que “nous préparer pour le futur”», explique enfin l’archevêque de Concepciòn.

 

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03 août 2020, 16:03