L'entrée solennelle de Jésus à Jérusalem. L'entrée solennelle de Jésus à Jérusalem.  

Les Rameaux, une célébration prophétique de la Semaine Sainte

«Les acclamations de l’entrée à Jérusalem et l’humiliation de Jésus. Les cris festifs et l’acharnement féroce.» Le Pape François relevait dans son homélie des Rameaux en 2019 le paradoxe de la liturgie de ce dimanche des Rameaux. Comment célébrer cette solennité particulière en ce temps de confinement qui ne permet pas toujours les processions? Entretien avec Mgr Philippe Marsset, vicaire général du diocèse de Paris sur la portée spirituelle et liturgique de cette célébration.

Delphine Allaire, Manuella Affejee – Cité du Vatican

Q - Que signifie cette entrée messianique de Jésus à Jérusalem? Est-ce un aboutissement, en quelque sorte, de la vie et de la mission de Jésus?

Le dimanche des Rameaux est un acte prophétique à la lecture de la Semaine Sainte. C’est-à-dire que Jésus rentre dans Jérusalem sur un âne, alors que les rois et les empereurs rentrent sur des chevaux lorsqu’ils veulent conquérir une ville. Jésus, lui, veut conquérir nos cœurs. Jamais par le titre de roi de fils de David, mais monté sur un âne pour montrer que sa royauté n’a pas grand-chose à voir avec la royauté traditionnelle et terrestre. La royauté de Jésus s’incarne sur la Croix.

La construction liturgique de cette célébration si particulière peut sembler paradoxale: elle débute par une exultation et bascule ensuite dans une tonalité plus grave, avec le récit de la Passion. Comment comprendre cette apparente dichotomie?

Ceux qui acclament Jésus, et qui ne sont pas forcément historiquement les mêmes que ceux qui le condamnent, nous montrent que l’adhésion à Jésus-Christ est fragile, versatile, et capable d’évoluer de manière dramatique car elle peut se faire manipuler. La foi n’a donc pas grand-chose à voir avec une opinion majoritaire ou minoritaire. La foi n’est pas croire que ce que nous ou autrui pensons est vrai, mais c’est penser que ce que Jésus nous dit est vrai. Il faut passer d’une acclamation extérieure désirée par la foule mais peu pensée, à une foi d’adhésion qui comprend non pas ce que d’autres voudraient, mais ce que Jésus voudrait que nous comprenions.

C’est la raison pour laquelle nous lisons la Passion lors des Rameaux. Est-ce que vous acceptez de voir jusqu’où Jésus va et ce que Jésus fait, et non pas l’idée que vous vous en faites. Nous lisons donc la Passion en s’arrêtant avant la Résurrection pour nous dire de manière liturgique et pédagogique qu’il faut nous-mêmes entrer dans ce drame du Jeudi Saint et de Vendredi Saint, dans le drame de notre vie. Assumer cette part de souffrance surtout en ce moment. Jésus ne peut pas sauver de l’extérieur, il ne le peut que s’il entre dans notre condition mortelle et pécheresse.

Dans le contexte actuel de crise, quels conseils donneriez-vous aux fidèles pour qu'ils puissent plonger pleinement et vivre ces saints mystères de manière renouvelée?

Cette frustration de ne pas être réunis peut aussi nous faire comprendre que l’Eglise n’est pas simplement cette assemblée de 40 ou 400 personnes qui vient chaque dimanche à la messe. L’Eglise est un peuple mondial, du ciel et de la Terre. Ce confinement nous appelle à penser l’Eglise avec cet autre regard.

Il faut aussi inventer des liturgies domestiques en revalorisant par exemple le lieu du crucifix dans nos maisons, faire un vrai repas pascal. Dédier des temps et des lieux dans nos petits appartements confinés pour construire de manière familiale ce temps étrange, mystérieux, qui nous fait épouser d’une autre manière la dramatique de notre condition humaine, mais aussi l’espérance et la foi.

Entretien avec Mgr Philippe Marsset, vicaire général du diocèse de Paris

(article mis à jour le 27 mars 2021)

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04 avril 2020, 07:00