Avant de reprendre le travail, deux infirmières prient dans une église de Buenos Aires, le 11 avril dernier. Avant de reprendre le travail, deux infirmières prient dans une église de Buenos Aires, le 11 avril dernier. 

Covid-19: L’Église ouvre ses portes aux plus démunis en Argentine

Le pays d’Amérique latine traverse actuellement sa pire crise économique depuis sa faillite déclarée en 2001. Sa dette publique atteint 311 milliards de dollars et celle-ci va s’accroître encore. Pour parer l’urgence face à la pandémie, l’État a lancé un programme d’investissements publics de 550 milliards de pesos, soit 8 milliards de dollars pour apporter une aide financière à 220 000 entreprises et à 11 millions d’Argentins parmi les plus pauvres. Ce sont ces derniers que l’Église veut aider, malgré des rentrées d’argent qui s’amenuisent.

Marie Duhamel – Cité du Vatican

«La rivière est formée de gouttes d’eau, et les grands fleuves de rivières ; les moyens dont dispose une personne peuvent vite finir mais pas quand elles sont cent ou mille». Suivant les enseignements de leur saint fondateur, la famille de Don Orione a ouvert ses portes d’abord aux Argentins directement touchés par le virus, convaincue que «nous pouvons faire des gestes extraordinaires dans un quotidien ordinaire». Dans la commune de San Miguel, ils ont gratuitement mis leur séminaire à disposition du personnel soignant, et s’apprêtent à libérer leur ancien noviciat à Almirante Brown pour y accueillir des malades du Covid-19.

Désengorger les bidonvilles

A Buenos Aires, l’Église ouvre ses portes aux sans-abris dans l’impossibilité de trouver refuge en cette période de confinement, mais également aux personnes âgées. Dans la capitale, près de 500 000 personnes de plus de 70 ans vivraient dans un logement précaire et se trouveraient ainsi particulièrement à risque. Certains habitent des bidonvilles en périphérie de la ville, «des zones à très forte densité qu’il faut aussi désengorger pour éviter une propagation rapide du virus», affirme le père Sebastian Garcia SCJ.

Le curé de la paroisse du Sacré Cœur à Barracas a mis 14 lits à disposition dans son église. Dès ce weekend, 30 lits seront également ouverts dans la paroisse de Notre-Dame-de-l’Espérance à Puerto Madero. Notre-Dame de Lujan dans le Barrio 31 de Retiro a aussi ouvert ses portes aux personnes âgées vulnérables. Des services hygiéniques, mais aussi des activités culturelles et récréatives leur sont proposées par les prêtres aidés de volontaires.

La Caritas propose quelque 400 lits, elle a également doublé ses dépenses pour l’achat de nourriture. La distribution d’aide se poursuit non-stop dans plusieurs lieux de culte de la capitale, à la Retonda, à Belgrano, à San José de Flores (là où le Pape a senti son premier appel), Caacupé, ou encore à Caballito.

En ce début d'hiver dans le pays austral, des campagnes de vaccination contre la grippe ont aussi démarré dans 15 paroisses de la capitale.

Difficultés économiques

Maintenir cette assistance aux plus pauvres ne se discute pas et l’Église espère pouvoir continuer à fournir ce service d’aide, ce qui ne sera pas sans difficulté. «Plus le temps passe, plus la situation deviendra critique, notamment dans les quartiers le plus défavorisé», affirme Mgr Enrique Eguia Segui. «De nombreuses personnes pensent que nous recevons de l’argent de l’État, ce qui n’est pas le cas» souligne l’évêque auxiliaire de Buenos Aires. Les messes publiques sont suspendues, le temps du confinement, et la quête avec elles. La question de l’argent devient «une source de préoccupation» explique-t-il. L’archidiocèse compte sur les donations en ligne, mais tous les fidèles ne savent pas se servir, ou ne disposent pas, de carte de crédit. Les donations sur internet couvriraient entre 40 et 60 % des fonds récoltés traditionnellement par le diocèse qui songe maintenant à emprunter «aux taux les plus favorables» pour poursuivre sa mission d’aide.

Outre l’assistance matérielle, l’archidiocèse de Buenos Aires se mobilise pour soutenir ses fidèles. Un «service d’urgence» a été rétabli : environ 35 aumôniers et 30 prêtres volontaires vont chaque jour au chevet des malades. Sur les 180 églises de la capitale, 50 proposent des messes ou la récitation du chapelet en ligne. On y trouve aussi des jeunes réfléchissant à l’Évangile du jour, des lectures de la Bible, des messages d’encouragement. On a vu aussi dans la ville, le Saint Sacrement porté en procession à bord d’un camion-remorque.

Le soutien des personnes consacrées

En cette période de pandémie, les religieuses et religieux offrent leur vie de prière et de contemplation au monde. Le 1er avril dernier la commission épiscopale pour la vie consacrée en Argentine publiait un message invitant «à regarder le passé avec gratitude, à vivre le présent avec passion, et à embrasser le futur avec espérance».

Soulignons enfin l’initiative interreligieuse #SeamosUno à laquelle participe la Caritas, la Banque alimentaire ou le CIAS (institut pour un leadership politique) qui, en partenariat avec l’État, proposent de distribuer un million de boîtes de conserve pour nourrir 4 millions de familles à travers le pays.

En Argentine, le confinement amorcé le 20 mars a été prolongé jusqu’au 26 avril dans les grandes villes du pays. Le virus a infecté plus de 2200 personnes et tué près de 100 malades.

 

 

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17 avril 2020, 13:11