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Le cardinal Bassetti en visite à la prison de Pérouse, le 18 avril 2020 Le cardinal Bassetti en visite à la prison de Pérouse, le 18 avril 2020 

Cardinal Bassetti : une supplication pour que la Vierge Marie nous protège

Le 1er mai prochain, en la mémoire de saint Joseph travailleur, l’Italie sera consacrée au Cœur Immaculée de Marie. Un acte significatif en cette période de pandémie, mais qui n’est pas inédit dans l’Histoire du pays, la dernière consécration au Cœur Immaculée de Marie remontant au 13 septembre 1959. Entretien avec le cardinal Gualtiero Bassetti, président de la Conférence épiscopale italienne (CEI).

Entretien réalisé par Alessandro Guarasci - Cité du Vatican

Le 1er mai prochain, la consécration de l’Italie au Cœur Immaculé de Marie aura lieu à 21 heures en la Basilique de Santa Maria del Fonte près de Caravaggio (diocèse de Crémone, dans la province de Bergame). Rappelons que le 13 septembre 1959, l'Italie avait reçu une consécration semblable, au terme du 16ème Congrès Eucharistique National célébré à Catane (Sicile).

Dans le contexte actuel de pandémie de Covid-19, le cardinal Gualtiero Bassetti, archevêque de Pérouse et président de la CEI, tient à rappeler que «les fidèles précèdent parfois les pasteurs. Les pasteurs acceptent alors leurs demandes. J'ai reçu environ 300 messages, lettres, courriers électroniques qui, même avec des sensibilités parfois différentes, me demandaient cette consécration, ou mieux, cet acte de confiance, explique le cardinal Bassetti. J'en ai discuté avec mes collaborateurs et j'ai senti que nous devions donner une réponse, une réponse de foi et d'amour à la Vierge, et une humble supplication. Qu'elle nous protège sous son manteau, comme nous le montrent ces belles Madones de la Miséricorde du XVe siècle».

La fête de Saint-Joseph travailleur fait penser au monde du travail, aux familles et aux nombreuses entreprises qui, en ce moment, font de grands efforts pour pouvoir repartir de zéro. Quelle est votre lecture du présent, et du moment difficile que traversent de nombreuses entreprises, de nombreuses familles, en raison du Covid-19?

Il est certain que l'acte de consécration à Marie du 1er mai est aussi lié à la fête de Saint-Joseph travailleur. Il nous renvoie donc au monde du travail qui est largement bloqué; il est nécessaire, dans les formes autorisées cependant, que tout soit fait pour la relancer. Je suis toujours ému quand je pense à la Sainte-Famille, où tout le monde a travaillé sans cesse dans un petit village. Le travail n'est donc pas seulement un facteur économique: je travaille et je subviens à mes besoins et à ceux de ma famille. Mais c'est aussi un fait inhérent à la vocation de l'homme, qui imite Dieu qui a créé le monde. Et puis le travail crée des relations; nous pensons toujours à la vie cachée de Jésus, mais elle n'était pas si cachée que ça, parce que tout le monde connaissait la famille du forgeron, du charpentier. Le travail génère toujours la communauté, il génère le dialogue, il génère des discussions, donc le travail est vraiment nécessaire à la vie de l'homme. Nous voulons donc mettre l'accent sur ces valeurs auxquelles nous croyons profondément en tant qu'Église.

La pandémie de Covid-19 suscite également divers gestes de solidarité, de proximité. Cela vous surprend-il? Et en tout cas, cela peut-il marquer, selon vous, une discontinuité avec un passé qui nous a plutôt habitués au consumérisme?

Je pars d'un tout petit exemple qui m'a fait verser quelques larmes. Cela s'est passé dans la prison de Pérouse, lorsque j'ai reçu le témoignage d'une collecte que les prisonniers ont fait, et nous savons dans quelles conditions les prisonniers vivent, sans parloir et sans possibilité d'être entendus. Les prisonniers ont fait une collecte pour l'hôpital, et un prisonnier qui avait trois euros sur son compte bancaire en a donné deux pour la collecte. Dimanche dernier, j'ai commenté cet épisode et j'ai dit : "C'est l'offrande de la veuve que Jésus a rapportée dans l'Évangile et qui restera un épisode insignifiant en soi parce qu'il a donné peu de changement. Mais Jésus déclare que jusqu'à la fin du monde, on se souviendra de ce fait". Et il y a aussi d'autres épisodes similaires, des gens qui se sont vraiment entraidés jusqu'au bout. Le Pape a raison: soit nous suivons le chemin de l'égoïsme, où chacun essaie de saisir le maximum pour survivre, soit nous arrivons au chemin du partage, qui est ce que nous enseigne l'Évangile, où en divisant l’on multiplie, où en donnant l’on reçoit, comme le dit saint François. Nous sommes à la croisée des chemins.  Ne prenons pas, comme le dit aussi le Saint-Père, le faux chemin de l'égoïsme car il ne nous emmènera pas loin!

Cardinal Bassetti, en Italie, de nombreux prêtres, de nombreux religieux ont payé un lourd tribu, en mourant lors de cette pandémie de coronavirus.  Mais de nombreux religieux et religieuses et de nombreux prêtres ont aussi œuvré au plus près du peuple. Que provoque en vous cette réflexion? Est-ce une façon d'être proche des communautés?

Ces médecins, ces infirmières, ces prêtres, ces religieuses, le Pape les a définis comme les anges et les saints de la porte d'à côté. Ce qui m'a fait de la peine, c'est qu'ils soient tous partis anonymement, sans possibilité d’avoir des funérailles, parce que les funérailles sont si édifiantes, non pas tant pour ceux qui sont morts, car on peut toujours prier et célébrer pour eux, mais pour la communauté chrétienne. La communauté chrétienne doit réfléchir à ces exemples, elle a besoin d’accompagner ses morts, surtout ceux qui ont été plus généreux et qui ont donné plus.

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21 avril 2020, 12:57