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Andrea Riccardi avait été reçu par le Pape François le 22 décembre 2017. Andrea Riccardi avait été reçu par le Pape François le 22 décembre 2017. 

La communauté de Sant’Egidio fête son 50e anniversaire

Le fondateur de la communauté née à Rome en 1968 nous livre son témoignage sur l’activité d’un mouvement qui compte aujourd’hui 60 000 membres dans le monde entier, engagés pour les pauvres, les malades, la paix et le dialogue interreligieux, et soutenus par la prière.

Alessandro di Bussolo – Cité du Vatican

Les festivités à Rome pour les 50 ans de la Communauté de Sant’Egidio, née en février 1968 par la volonté d’un groupe d’étudiants romains guidés par Andrea Riccardi, culminent ce samedi 10 février 2018 avec une messe à la cathédrale Saint-Jean-de-Latran, présidée par le cardinal Pietro Parolin, Secrétaire d’État du Saint-Siège. Les nombreux Romains engagés dans la communauté étaient physiquement présents, ainsi que certains des 60 000 membres actifs à travers le monde.

Dans son homélie, le cardinal Parolin est revenu sur l’image évangélique de la guérison du lépreux par Jésus à Capharnaüm, montrant qu’au-delà de la guérison physique, Jésus l’avait libéré de la ségrégation. «Libérer de la ségrégation et de la solitude, en insérant dans le circuit de la vie : c’est ce que vous faites depuis des années, depuis que, jeunes étudiants, vous avez affronté avec passion les bidonvilles romains, en dépassant de nombreuses barrières», a-t-il relevé.

Il les a remercié d’avoir montré, «avec enthousiasme et humilité, que personne n’est exclu devant Dieu», et qu’aucun peuple ne peut être otage de la violence. «Vous vous êtes faits attentifs aux blessés de la guerre et de la misère : je pense aux réfugiés et aux émigrés, en particulier aux corridors humanitaires pour les réfugiés de la Syrie et de la Corne de l’Afrique.»

La prière, la pauvreté et la paix, qui sont les trois axes sur lesquels se déploie la communauté, ont permis à Sant’Egidio de développer un témoignage cohérent de l’espérance chrétienne. «Le monde global a besoin d’une réalité comme la vôtre, enracinée dans le local, mais aussi capable d’habiter la dimension globale avec un esprit de fraternité», a souligné le cardinal Parolin.

Voici quelques extraits de l’entretien accordé par Andrea Riccardi à la section italienne de Vatican News :

Professeur Andrea Riccardi, il y a 50 ans, vous et vos compagnons du lycée Virgile, vous vouliez changer le monde. Et aujourd’hui, que veulent les 60 000 membres de Sant’Egidio ?

Le climat de 1968 était un climat utopique, contradictoire aussi, mais caractérisé par une audace, l’idée que l’on pouvait changer le monde… Ensuite a évolué, de nombreuses façons… Aujourd’hui nous nous trouvons face à un contexte radicalement différent. Et surtout un contexte global. Et ce contexte global inspire une grande peur : le terrorisme, les migrants… Sant’Egidio veut dire qu’aujourd’hui il ne faut pas avoir peur, qu’il ne faut pas élever des murs, que l’on peut faire quelque chose pour les autres, que l’on peut rendre ce monde meilleur, et que la foi qui grandit dans l’écoute de la Parole de Dieu fait lever l’espérance.

Sant’Egidio, la communauté des trois P : la prière, les pauvres et la paix. C’est ainsi que vous a rebaptisé le Pape François, qui vous connaît depuis l’époque de Buenos Aires. La prière, de Sainte Marie du Trastevere à l’esprit d’Assise, est toujours dans le cœur de la communauté ?

La Parole de Dieu est le cœur, parce qu’autrement le christianisme, notre vie, devient une idéologie ou une morale. Et la Parole de Dieu est aussi une lampe sur nos pas pour lire les signes des temps. Le thème des signes des temps est très important, depuis Vatican II, nous devons lire l’histoire. Mais la Parole de Dieu est nécessaire qui est un lampe, comme le dit le Psaume 119, et qui nous guide pour discerner les temps, pour comprendre ce que nous devons faire, qu’est-ce que le Seigneur veut que nous faisions.

Entre les enfants de 1968 qui abandonnaient l’école, et les réfugiés des corridors humanitaires en 2018, la parole clé est toujours l’amitié entre les anciens et les nouveaux citoyens, et entre les générations ?

Il faut parler avec les pauvres, il faut intégrer les pauvres dans la communauté, au milieu des gens, parce qu’ils ne sont pas à assister mais à intégrer. Les enfants restent au cœur de la communauté à travers l’école de la paix, dans le monde entier, mais aussi les personnes âgées, ce problème du vieillissement dans les pays du nord… Les migrants aussi, à travers les corridors humanitaires. L’amitié, le dialogue, est le premier pas vers l’intégration.

De la paix dans les périphéries romaines aux guerres civiles africaines, vous êtes devenus des pacificateurs. Mais la méthode Roncalli (de Jean XXIII, ndlr), fonctionne encore, celle qui cherche à identifier ce qui unit et à mettre à part ce qui divise ?

Nous avons travaillé avec le Mozambique en faisant de la coopération, mais il y avait une guerre civile terrible qui dévastait le pays en faisant des milliers de morts. Et là, nous avons découvert le devoir de travailler pour la paix. Les chrétiens ont un charisme de paix. La méthode Roncalli est celle que nous avons utilisé spontanément dans les négociations au Mozambique entre le gouvernement et la guérilla. Je crois que c’est quelque chose de fondamental, de rechercher ce qui unit et non pas ce qui divise, parce que ce qui unit, c’est l’être humain, le fait d’avoir une communauté de destin national, c’est le futur, le bien des enfants, même si beaucoup de choses divisent les hommes. Mais les différences ne doivent pas diviser.

En cinquante ans, Sant’Egidio a rencontré des milliers d’histoires, de visages et de personnes… Est-ce que l’une d’entre elles vous a particulièrement marqué ?

Je voudrais parler de Marilena, une volontaire qui n’est plus là aujourd’hui, et qui nous avait accompagné depuis le début pour servir dans les périphéries romaines, et aussi en Afrique. La communauté de Sant’Egidio est faite du travail de nombreuses personnes qui donnent leur temps pour raccommoder le tissu du monde ou de nos villes déchirées. C’est un petit travail de chaque jour, mais à la vie, ceci construit la paix.

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10 février 2018, 13:27