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RD. Congo: la chasteté sacerdotale, les droits des enfants et des personnes vulnérables

Le 4 mars 2022, réunis pour leur 59ème assemblée plénière, les évêques membres de la CENCO, la conférence épiscopale nationale du Congo, ont adressé une exhortation à tous les prêtres et leurs collaborateurs sur la chasteté sacerdotale, les droits des enfants et des personnes vulnérables.

Donatien Nyembo SJ - Cité du Vatican

«A l’école de Jésus-Christ (Eph. 4,20)», tel est le titre de la lettre d’exhortation signée  le 4 mars 2022 par les évêques de la CENCO, la conférence épiscopale nationale du Congo, à leurs collaborateurs prêtres exerçant en République démocratique du Congo à l’occasion du 150ème anniversaire du dies natalis du Saint Curé d’Ars, Jean-Marie Vianney. Les évêques expriment leur joie de constater que de très nombreux prêtres vivent fidèlement leurs engagements sacerdotaux, que leur témoignage ne cesse d’édifier le peuple de Dieu et l’Église toute entière. En même temps, les prélats congolais font part de leur inquiétude se disant «peinés de constater que certains d’entre vous ne mènent pas une vie sacerdotale authentique». Les évêques veulent attirer spécifiquement l’attention des prêtres «sur la nécessité d’un comportement responsable vis-à-vis des enfants nés d’une femme et un prêtre».

“Les évêques expriment leur joie de constater que de très nombreux prêtres vivent fidèlement leurs engagements sacerdotaux, que leur témoignage ne cesse d’édifier le peuple de Dieu et l’Église toute entière.”

Méditer sur la chasteté et le célibat sacerdotal

Rappelant l’engagement au célibat pris par tous leurs prêtres au moment de l’ordination diaconale, les évêques rappellent que la chasteté est un don de soi pour une fécondité spirituelle qui ne se perçoit qu’avec le regard de la foi et le célibat sacerdotal, l’expression du mystère de la configuration au Christ. «Loin d’être des obstacles à notre épanouissement, ces conseils évangéliques nous établissent dans une profonde amitié avec le Christ», écrivent les évêques.

Citant le saint Pape Jean-Paul II dans sa lettre du jeudi saint 1979, les évêques soutiennent que le célibat sacerdotal vise le service dans la liberté: «le célibat est le signe d’une liberté en vue du service. Par ce signe, le sacerdoce hiérarchique, ou “ministériel“, est, selon la tradition de notre Église, plus étroitement ordonné au sacerdoce commun des fidèles.».

La chasteté et le célibat mis à l’épreuve

Les évêques de la RDC, bien que conscients de la valeur du sacrement de l’Ordre, reconnaissent également les difficultés inhérentes à celui-ci, comme «l’inclination ou les pulsions de l’instinct qu’il faut éduquer; le mouvement de liberté sexuelle qui se mondialise et ne laisse pas l’Église intacte, remettant en question la valeur de la continence parfaite; l’usage incontrôlé des moyens de communication; les pesanteurs culturelles dans certains milieux qui ne connaissent pas d’interdit sur le plan sexuel et qui nécessite un assainissement; la pauvreté matérielle ou la misère qui ne favorisent pas la pratique des vertus.».

C’est dans ce contexte que les évêques appellent les prêtres à témoigner du sacerdoce du Christ en honorant leurs obligations cléricales de la chasteté et du célibat, les conservant tel un trésor, «tout en sachant que nous portons ce trésor dans des vases d’argile».

Le célibat plus qu’une question disciplinaire

A en croire les évêques de la CENCO, une interprétation tronquée de l’Enseignement de l’Église pourrait réduire le célibat à une question purement disciplinaire. Pourtant le Concile Vatican II renseigne que le célibat a de multiples convenances avec le sacerdoce. «Le fondement du célibat ne se trouve pas dans la discipline ecclésiastique, encore moins dans une culture, il est dans la consécration de toute une vie au Christ».

Un défi pastoral majeur

La question de la chasteté sacerdotale et de l’appréciation morale et juridique des actes liés à la sexualité des clercs est de plus en plus débattue publiquement, non seulement dans les médias, mais aussi dans les milieux ecclésiastiques. C’est le constat que font les membres de la conférence épiscopale congolaise reconnaissant que cela constitue un défi pastoral majeur pour l’Église-Famille de Dieu en RD Congo.

Les évêques remarquent que l’approche de cette préoccupation n’est pas uniquement théologique ou disciplinaire, «elle est plus psychologique et juridico sociale basée sur les droits des enfants et des personnes vulnérables.

Reconnaitre l’existence des enfants des prêtres

En ce qui concerne les enfants des prêtres, les évêques invitent à considérer les revendications présentées par les associations ayant pour but la défense des personnes nées des prêtres catholiques dans le monde entier. «Ces associations visent à faire sortir de l’anonymat et à aider psychologiquement les nombreuses personnes nées d’une relation entre une femme et un prêtre dans différentes parties du monde. Certains de ces enfants revendiquent individuellement ou par voies collectives leurs droits, allant jusqu’aux droits des successions. Nous avons l’obligation morale de reconnaitre que ces personnes existent et souffrent dans le silence. Elles demandent reconnaissance et accompagnement».

Justice et réparation

Les membres de la CENCO exhortent les prêtres à être justes en réparant les préjudices causés aux victimes, les enfants et les femmes contraints à vivre dans la clandestinité. «Exhorter et persuader ne suffit plus, ces attitudes rendent difficile l’amendement des coupables et sèment confusion et scandale parmi les fidèles». C’est pourquoi, «le prêtre géniteur d’enfants  a besoin à la fois de la miséricorde et de la réprimande de la part de l’Église.».

«Considérant d’une part, les droits et obligations des parents à l’égard de leurs progénitures et de celles-ci à l’égard de leurs parents, et d’autre part l’incompatibilité de la charge de “père de famille“ avec le ministère et la vie sacerdotale en régime catholique romain, nous demandons à tout prêtre de l’Eglise-Famille de Dieu ayant un enfant d’aller s’en occuper complétement et pour ce faire de solliciter la dispense des obligations sacerdotales auprès du Saint-Père. Chaque évêque diocésain est disposé à accompagner par les voies et moyens canoniques tout clerc de sa juridiction concerné par cette situation.»

La CENCO dispose que dans le cas où le prêtre avec descendance résisterait et ne voudrait pas demander la dispense des obligations cléricales, alors que selon jugement prudent de l’évêque diocésain, la situation requiert que le prêtre prenne en charge les responsabilités dérivant de sa paternité, «l’Evêque doit présenter le cas au Saint-Siège pour la peine maximale de renvoi de l’état clérical».

“nous demandons à tout prêtre de l’Eglise-Famille de Dieu ayant un enfant d’aller s’en occuper complètement et pour ce faire de solliciter la dispense des obligations sacerdotales auprès du Saint-Père”

Le Carême, temps favorable

Il est clair que la grâce sacerdotale n’altère pas les inclinations de l’affectivité et les pulsions de l’instinct. Voilà pourquoi, les évêques exhortent les prêtres «à être davantage la figure du Christ au milieu de son peuple en vivant dans la fidélité à sa Parole et aux engagements sacerdotaux [...] accueillir le célibat comme un don gratuit de Dieu et de le vivre de manière radicale». Cela ne peut se réaliser, estiment-ils, que «si chacun de nous porte un regard vrai sur son ministère et sa vie de prêtre, en se rappelant toujours les paroles du Christ: “la vérité vous rendra libres“ (Jn8, 32)».

Les prélats invitent à mettre à profit le carême, ce temps favorable de réarmement moral et spirituel, «pour approfondir notre foi, pour accroître notre proximité avec le Seigneur et renouveler notre engagement au service de Dieu et de notre prochain, avec une profonde conscience que nous sommes le sacrement du Christ».  

«La proximité avec Jésus nous invite à ne pas craindre, non parce que nous sommes forts, mais parce que nous regardons vers Lui, nous nous accrochons à Lui pour raviver le don gratuit de Dieu, ce don qui est en nous depuis qu’il nous a imposé les mains (cf. Tm 1,6).», ont-ils conclu en demandant l’intercession de la Vierge Marie.

“accueillir le célibat comme un don gratuit de Dieu et de le vivre de manière radicale”

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18 mars 2022, 11:17