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Une mine de cobalt dans le sud du Congo Une mine de cobalt dans le sud du Congo 

Des «minerais du sang» exportés légalement

Plusieurs associations laïques et missionnaires européennes et congolaises dénoncent un accord signé entre l’Union européenne et le Rwanda sur l’exportation de minerais extraits selon eux illégalement de la République démocratique du Congo (RDC). Elles ont manifesté ce samedi 6 avril dans plusieurs villes d’Europe pour exiger l’abrogation de ce texte qui selon elles, blanchissent ces «minerais du sang».

Xavier Sartre – Cité du Vatican

Du lithium, des terres rares, du tungstène, de l’or, de l’étain, du tantale: autant de minerais que l’on retrouve dans les batteries des téléphones portables ou des voitures électriques et qui vont devenir de plus en plus demandés au fur et à mesure du développement des véhicules électriques. Autant de minerais dont est pourvu à foison l’Est de la République démocratique du Congo. Mais la guerre depuis près de trente ans dans cette région favorise le pillage de ces ressources naturelles, ce que dénonce notamment Rete Pace per il Congo - Réseau Paix pour le Congo - une association de missionnaires catholiques et de laïcs italiens et congolais.

Ils s’associent avec le réseau Insieme per la pace in Congo - Ensemble pour la paix au Congo - pour protester particulièrement contre le protocole signé entre l’Union européenne et le Rwanda le 19 février dernier sur le développement des exportations de ces minerais depuis Kigali. «Un scandale» pour ces réseaux qui affirment que ces ressources proviennent illégalement de RDC.

 

John Mpaliza, membre de Paix pour le Congo, rappelle que plusieurs rapports internationaux comme ceux des Nations unies ou d’ONG comme Global Witness ont montré que ces minerais, s’ils peuvent être présents dans le sous-sol du Rwanda, ne sont pas en quantités suffisantes pour justifier les niveaux d’exportations rwandais et qu’ils proviennent donc de l’Est de la RDC. «C’est vraiment criminel de voir qu’une institution comme l’Union européenne, basée sur le respect des droits de l’Homme, aide et finance un pays comme le Rwanda qui occupe depuis 1996 une partie du Congo, le saccage, en extrait des minerais qu’il exporte ensuite».

D’où la demande d’abrogation du protocole d’accord entre Bruxelles et Kigali, alors même que le texte prévoit de garantir «la traçabilité, la lutte contre la corruption, la lutte contre le trafic de minerais», explique John Mpaliza. Le texte s’inscrit dans la lignée du règlement européen en vigueur depuis le 1er janvier 2021 sur la régulation des minerais en territoires de conflit. D’où l’amertume de John Mpaliza et de tous les membres de son réseau qui ont «beaucoup lutté» pour cette loi européenne, «malheureusement a été mal écrite surtout à cause des lobbys des compagnies multinationales» regrette-t-il.

«Cela fait dix ans que nous parlons avec des parlementaires européens, en espérant rencontrer des personnes ayant une conscience, qui ne peuvent pas dire qu’ils ne savent pas ce qu’il se passe dans l’Est du Congo, et surtout comment les minerais en sortent», confie le membre du réseau de paix pour la RDC. «Ce sont des minerais du sang, de conflits» et le protocole, à ses yeux, n’est qu’un moyen pour «blanchir» ces exportations via le Rwanda. «Derrière tout cela, il y a la mort de beaucoup d’enfants, le viols des mères, des filles, des bébés» poursuit-il.

Entretien avec John Mpaliza, Congolais du réseau Paix pour le Congo

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06 avril 2024, 16:22