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Des Haïtiens manifestent à Port-au-Prince pour exiger la démission du Premier ministre Henry. Des Haïtiens manifestent à Port-au-Prince pour exiger la démission du Premier ministre Henry.   (ANSA) Les dossiers de Radio Vatican

MSF en Haïti: les patients se retrouvent abandonnés

La terreur se vit toujours en Haïti, où le gouvernement a prolongé jeudi 7 mars d’un mois, l’état d’urgence; face à la recrudescence de la violence des gangs qui exigent la démission du Premier ministre Ariel Henry. Les autorités espèrent rétablir l’ordre et reprendre le contrôle d’une situation, «alarmante», selon Médecins Sans Frontières. «Sur l'année 2023, 4000 cas de victimes de violences sexuelles sont arrivés dans les structures de MSF», a confié Sarah Chateau, responsable des programmes.

Entretien réalisé par Myriam Sandouno – Cité du Vatican

C’est une situation critique que vivent les Haïtiens depuis bien longtemps. La capitale Port-au-Prince reste paralysée par la violence des gangs, qui a couté la vie à plus de 1000 personnes depuis le début de cette année dans ce pays des Caraïbes, situé sur la partie ouest de l'île Hispanolia. Rues barricadées et désertes, écoles fermées, manque d’eau, quelques hôpitaux fermés, rareté de certains produits sur le marché, actes de vandalisme, d'agressions sexuelles et de kidnapping commis par des bandes criminelles etc.., «la situation en Haïti est plus qu’insoutenable», a dénoncé mercredi 6 mars  le Haut-Commissaire des Nations unies pour les droits de l'homme. Volker Türk a appelé au déploiement urgent d'une mission multinationale de soutien à la police nationale haïtienne débordée. Un chef de gang a menacé d’une guerre civile, si le Premier ministre Ariel Henry ne démissionne pas.

Face à ce «chaos», et dans le but de répondre à l'afflux de blessés, Médecins Sans Frontière a annoncé renforcer sa présence en Haïti, où la situation s’est dégradée ces derniers jours. «La situation est alarmante. Nous avons nos équipes qui sont présentes sur place. On a plusieurs projets où on prend en charge des patients, et on voit arriver par exemple dans notre hôpital de traumatologie, des blessés par balle principalement», a affirmé Sarah Chateau, responsable des programmes de MSF en Haïti. L’ONG reçoit entre 10 et 15 blessés par balle par jour, et les équipes de Médecins Sans Frontière ont du mal à se déplacer.

L’un des gros risques sécuritaires que souligne MSF sont les balles perdues «mais pas que depuis jeudi, depuis maintenant presque deux, trois ans…. On le voit avec les patients qui arrivent, ce sont des gens qui sont victimes directement de ce conflit, mais pas forcément attaqués directement. Des fois, c'est juste être dans le quartier où ça tire, les balles fusent dans tous les sens, et tombent partout», alerte Sarah Chateau.

Des hôpitaux fermés

La responsable des programmes de MSF en Haïti confie que plusieurs hôpitaux ont dû fermer, dans ce contexte de violences qui ne cesse de prendre de l’ampleur.

«L'hôpital universitaire à Port-au-Prince, qui se trouve dans l'un des quartiers proches du Palais National, s'est retrouvé un peu au milieu de ces échanges de combats, de conflits entre les gangs et la police». Les patients se retrouvent abandonnés, et les médecins ne peuvent plus accéder aux hôpitaux, certains services un peu pillés, a-t-elle déclaré.

À cela s’ajoute aussi des problématiques d'approvisionnement pour tous ces hôpitaux. «On a des containers avec du matériel médical qui est au port maintenant depuis un petit moment. On avait réussi à le débloquer, on devait aller le chercher jeudi dernier et du coup sans ce matériel là, on va avoir du mal à monter en puissance et prendre plus de patients». Jeudi 7 mars, l'opérateur du port de Port-au-Prince a annoncé la suspension de son activité en raison des «troubles à l'ordre public» dans la capitale haïtienne.

Des cas d’agressions sexuelles

Médecins Sans Frontières alerte sur les cas d’agressions sexuelles. «Sur l'année 2023, affirme Sarah Château, 4 000 cas de victimes de violences sexuelles sont arrivés dans les structures de MSF à Port-au-Prince». Malheureusement, «Haïti en a connu énormément ces derniers temps. Janvier était d'ailleurs le mois le plus violent. On parle de plus de 3 000 kidnappings en 2023». Pour la responsable des programmes de MSF en Haïti, il urge de conduire ce pays à «des solutions politiques, des négociations qui permettent un apaisement et un retour au calme, même si ça paraît très compliqué pour l'instant; de voir dans quelle mesure l'opposition et les groupes armés laisseront cet espace de discussion ouvert».

Une transition politque 

Les États-Unis orientent leur regard sur la crise haïtienne, le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken s'est entretenu jeudi avec le Premier ministre Ariel Henry, et a plaidé pour une transition politique «urgente». Il a appelé à une «réponse internationale». Le gouvernement haïtien a prorogé d’un mois, jeudi 7 mars, l’état d’urgence sécuritaire décrété sur tout le département de l’ouest, et les gangs eux, continuent de régner. 

Entretien avec Sarah Chateau, responsable des programmes de MSF en Haïti

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08 mars 2024, 16:15